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Posté le 29 Août, 2017 dans Sexo, Troubles de la sexualité

La vestibulodynie expliquée par Camille T., sage-femme et ostéopathe

La vestibulodynie expliquée par Camille T., sage-femme et ostéopathe

« Non, souffrir pendant les rapports n’est pas normal. »

Vestibulodynie. Si ce nom ne vous évoque rien d’autres que le vestibule, le hall d’entrée d’une maison, c’est normal. D’un point de vue médical, il s’agit d’une maladie qui fait souffrir de nombreuses femmes pendant les rapports. Une rencontre avec Camille T., une pétillante trentenaire, sage-femme, ostéopathe et spécialiste de ce trouble, nous a permis d’y voir plus clair. On vous dit tout.

 

Bonjour Camille T., pourrions-nous en savoir un peu plus sur vous ?

Je suis sage-femme et ostéopathe. J’exerce dans un cabinet à Lyon et à la maternité du Val d’ouest. En tant que sage-femme, je peux intervenir dans de nombreux cas : dans la prise en charge du périnée, qu’il soit douloureux, ou qu’il ait besoin de rééducation post accouchement. Je fais aussi le suivi gynécologique de la femme en bonne santé : frottis, contraception et bien sûr, le suivi des grossesses et après l’accouchement. Je peux prescrire des médicaments, traiter les problèmes urinaires, de constipation ou encore les douleurs intimes type vestibulodynie.

D’ailleurs la vestibulodynie, c’est quoi au juste ?

La « vestibulodynie » parfois appelée « vestibulite vulvaire » ou « vestibulite » est en fait une douleur à la vulve (ensemble des organes génitaux externes ndlr). C’est un type de vulvodynie : « Inconfort vulvaire chronique, le plus souvent à type de brûlure, sans lésion visible pertinente et sans maladie neurologique cliniquement identifiable. » (International Society for Study of Vulvovaginal Disease). Lorsque la vulvodynie est localisée au niveau du vestibule, la chambre en forme de « U » avant le vagin, on lappelle vestibulodynie.

Concrètement c’est une douleur située à l’entrée du vagin, qui va être diffuse ou au contraire, bien localisée en fonction des patientes. Cette douleur peut se manifester de façon continue ou bien, uniquement lors d’un contact local : une relation sexuelle, une position assise, des vêtements trop serrés, l’introduction d’un tampon, d’un spéculum ou même la pratique d’une activité comme le vélo ou l’équitation. Les raisons ne sont pas vraiment connues : infections, traumatismes ou terrain propice depuis l’enfance peuvent être en cause. Parfois il n’y a pas vraiment de causes clairement définies et la méconnaissance de son corps peut aggraver la situation. Enfin sachez que la vestibulite n’est pas une maladie sexuellement transmissible, ni un cancer.

Quel type de douleur est décrite par les femmes ?

Les patientes témoignent de plusieurs sensations, parmi elles : un échauffement, une irritation, une brûlure, une douleur très puissante dans toute la région des organes externes, une sensation de vive coupure, un déchirement pendant le coït, la douleur de la défloration à chaque rapport, l’impression d’avoir une lame de rasoir sur la peau ou encore, la sensation d’être à vif. Malgré tout cela, tout peut apparaître comme étant normal lors d’un examen clinique et il est difficile de déceler l’anomalie.

Mais alors, comment la déceler et par qui la faire diagnostiquer ?

Pour diagnostiquer cette maladie, il faut faire le test de coton tige. Après avoir écarté la présence d’éventuelles infections, le docteur introduit un coton-tige dans le vestibule et si la patiente souffre, elle a une vestibulodynie. Ce test peut être réalisé par un gynécologue, un dermatologue, un sexologue, un médecin généraliste, un urologue, une sage-femme ou toute personne formée à cette pathologie. Attention néanmoins, certains gynécologues ou autres professionnels de la santé peuvent passer à côté et vous dire que tout va bien ou qu’il s’agit simplement d’une sécheresse vaginale. Si les douleurs persistent, n’hésitez pas à consulter plusieurs avis, surtout celui d’une sexologue ou d’une sage-femme si le gynécologue ne trouve rien.

Comment se fait-il que les gynécologues ne puissent pas toujours la diagnostiquer ?

La vestibulodynie est une maladie dite nouvelle. Cela fait environ dix ans que l’on en sait un peu plus sur cette pathologie. Bon nombre de professionnels n’ont pas été formés et n’ont pas toujours la solution. Dans ce cas, on se réfère souvent à des praticiens spécialisés comme Dr Prunaret-julien (gynécologue), Dr Ronger salve (dermatologue) et Sophie Rochet (médecin, psychothérapeute et sexologue) à Lyon. Pour les autres villes, consultez cet annuaire :  http://www.lesclesdevenus.org/annuaire-pro/.

Peut-on soigner la vestibulodynie ? Comment ?  

Les traitements actuels sont utilisés, surtout dans le but de diminuer la douleur. Il y a bien des moyens pour s’en sortir, la plupart des femmes guérissent. Le chemin vers la guérison se fera sûrement par petites améliorations successives, mais vous pouvez, à juste titre, espérer une guérison complète et définitive, à terme. Parmi les traitements, on peut citer :

1 – Le traitement par les médecines douces :

Les techniques de rétroaction biologique (rééducation de la musculature périnéale par méthode manuelle ou à l’aide d’une sonde en biofeedback) et massage relaxant sont, à ce jour, les traitements les plus efficaces. On apprend à la patiente comment relâcher son périnée, on fait des étirements du muscle et on travaille avec des dilatateurs vaginaux de plusieurs tailles pendant plusieurs séances. Les séances sont prises en charge par la sécurité sociale.

D’autres médecines douces peuvent être appliquées comme par exemple : l’acupuncture, les bains froids ou tièdes, la thérapie cognitivocomportementale ou encore des douches au bicarbonate de soude pour soulager l’inflammation.

2 – Un traitement à base de de crèmes et d’infiltrations vestibulaires :

On peut avoir recours à l’utilisation de crèmes anesthésiques, anti-inflammatoires, hormonales. Aussi, on applique une fois par jour après la toilette intime ou après chaque miction : de l’huile d’amande douce, de jojoba, des crèmes cicatrisantes ou du gel d’aloe vera, etc. Les injections locales d’anesthésiques (lidocaïne) ou de corticoïdes directement dans la zone enflammée : le vestibule, sont aussi envisageables.

3 – Un traitement médicamenteux :

Des antibiotiques et des antifongiques sont également prescrits s’il y a une infection associée. Les antidouleurs sont souvent efficaces tout comme les anxiolytiques utilisés à faible dose. Attention, certains traitements peuvent conduire au déclenchement ou à l’entretien d’une hypersensibilité de la muqueuse vulvaire et donc d’une vestibulodynie. À cela il faudrait systématiquement ajouter un traitement visant à restaurer la flore vaginale et intestinale. Des hormones appelées corticostéroïdes ainsi que des protéines nommées interférons sont parfois prescrites. Dans certains cas, une chirurgie peut aussi être pratiquée.

4 – Un traitement par l’alimentation :

L’alimentation joue un rôle très important sur la physiologie musculaire, la sensibilité de la muqueuse, des tissus et sur le stress. Il conviendrait, dans l’idéal, de suivre un régime strict pendant un mois, associé à du charbon végétal et des probiotiques ; surtout lorsqu’il y a un déficit intestinal. Il serait donc bon d’éviter le pain sous toutes ses formes, les laitages de vache en excès et les sucres rapides, très présents dans l’alimentation quotidienne habituelle. Ces aliments favorisent aussi les inflammations, il est donc bon de les limiter. Ensuite, il faudra réintroduire progressivement chacun des aliments séparément en fonction de l’amélioration de la douleur. Pour booster la lubrification et l’hydratation, les compléments à base d’huile d’onagre sont très intéressants.

Outre les traitements, avez-vous aussi des conseils à donner pour mieux vivre cette maladie ou en limiter les effets ?

Oui, une sensibilisation pour prendre de bonnes habitudes accompagne souvent le traitement. N’oublions pas que la maladie affecte particulièrement les époux qui bien souvent souffrent en silence et se sentent démunis voire presque « coupables » face à cette problématique. Il est donc important de se donner tous les moyens pour préserver son couple, et faciliter les moments intimes. Voici quelques conseils :

Ne pratiquer qu’une seule toilette intime par jour avec de l’eau tiède ou froide.

Utiliser de préférence de l’eau claire pour la zone irritée et du savon de Marseille ou d’Alep pour le reste.

Éviter les douches vaginales : l’introduction d’eau dans le vagin.

Éviter les piscines et les bains chauds

Ne pas utiliser de protège-slips quotidiens, de déodorants intimes ou de papier toilette parfumé.

Pendant les règles, utiliser des serviettes bio en coton pur, une coupe menstruelle ou des serviettes hygiéniques lavables.

Porter des sous-vêtements en coton.

Porter des vêtements amples et éviter les pantalons serrés

Utiliser un lubrifiant adapté pendant les rapports sexuels.

Laver ses sous-vêtements avec des produits adaptés aux peaux sensibles et éviter les adoucissants.

Concernant les rapports sexuels :

Avant, appliquer une crème anesthésiante 10 à 15 minutes ou bien, une huile végétale comme l’amande douce ou même, un lubrifiant hydrosoluble à base de glycérine.

Éviter les spermicides et les gels contraceptifs ou autres crèmes qui pourraient irriter la vulve. Ne pas utiliser non plus de lubrifiants composés de produits chimiques ou de conservateurs.

Pendant les rapports, il faut essayer de trouver un angle de pénétration qui réduirait la douleur : avec un coussin sous les fesses et le dos courbé, parfois le vagin s’ouvre plus facilement chez certaines femmes.

Après les rapports, uriner et rincer la vulve à l’eau froide puis appliquer de la glace pour éviter les brûlures.

Quel est l’état d’esprit des patientes lorsqu’elles débutent le processus de soin ? Et lorsqu’elles quittent définitivement le cabinet ?

Les patientes sont souvent contentes d’arriver au cabinet car dans la plupart des cas, le parcours a été long. Elles sont pleines d’espoir et de motivation pour prendre en charge leur problème. Elles sont le plus souvent contente que l’on prenne le temps de leurs expliquer leur maladie, le traitement

Lorsque les séances sont terminées, je pense que celles qui sont guéries sont heureuses et en profite souvent pour en parler autour d’elle. Il m’arrive fréquemment d’avoir des patientes qui sont les copines de madame X ! Grâce aux patientes, l’information circule bien, le sujet devient moins tabou et moins méconnu. La méthode de traitement que je propose est la médecine douce, mais elle ne fonctionne pas pour tout le monde. Alors, je cherche à orienter mes patientes qui ne sont pas guéries vers le réseau de professionnels avec qui je travaille : ostéopathe, acupuncteur, conseillère conjugale, etc.

Vestibulodynie, vaginisme : quelle différence ?

Le vaginisme est une contraction prolongée des muscles du vagin. Cette contraction du périnée devient un réflexe involontaire qui ne se contrôle pas. De fait, elle empêche la pénétration du pénis lors de rapports sexuels ou toute forme d’intrusion lors d’un examen gynécologique ou de l’usage de tampons. Une tentative de pénétration peut entraîner de graves douleurs. Sa source est souvent psychologique mais découle principalement d’une source physiologique. Le vaginisme se soigne aussi, une prise en charge est alors nécessaire. La vestibulodynie peut être responsable du vaginisme.

Un conseil à donner à toutes ces femmes qui souffrent pendant les rapports et qui ne savent pas trop vers qui se tourner ?

Le premier conseil, c’est de bien comprendre que : non, souffrir pendant les rapports n’est pas normal. Ensuite, évitez de trop vous laver la zone intime : maximum une fois par jour sans savon. Mettez de l’huile d’amande douce et consultez au plus vite un spécialiste. Et surtout ne pratiquez jamais l’auto-médication! Le site lesclesdevenus.org donne accès à un répertoire de professionnels formés à la prise en charge de ces douleurs. Et non, il n’y a aucune fatalité, ces troubles se soignent alors restez positives ! Pour plus d’information, n’hésitez pas à consulter mon site : camille-tallet-sage-femme.fr.

Auteure : Sirine S.

3 Commentaires

  1. Contente de voir que cette pathologie sort peu à peu de l’ombre. 🙂
    Beaucoup de médecins ne sont pas formés pour le diagnostic, mais pire, beaucoup ne sont pas sensibles aux douleurs sexuelles. Ou en tout cas, ne se montrent pas assez sensibles alors que la vestibulite nous fait souffrir physiquement et psychologiquement.

  2. oui la vestibulite c’est vraiment une sale pathologie 10 ans tout essayé sauf opération ,médocs n’en parlons pas qui font grossir lamaline tramadol lyrica laroxyl, et bien d’autres effets secondaires, j’essaie en ce moment l’homéopathie.et la médecine traditionnelle chinoise. Diagnostiquée en 2010 par le docteur Bautrant vu 3 personnes hypnose-magnétiseur- acupuncture etc etc la seule personne qui m’aidait vraiment était le Professeur Paniel à Créteil étant âgé, il a été obligé de partir pour lui c’était un sacerdoce. peiné lui aussi de son départ et patientes toutes déçues, cette pathologie est encore tabou, les jeunes praticiens connaissent un peu, que faire pour faire reconnaître cette pathologie tant de femmes et d’ hommes en souffrent..je connais une seule personne apparemment guérie mais tant d’autres souffrent. Cela ne se voit pas mais pourtant quelle souffrance cela fait souffrir mais pas mourir.

  3. Le dr Eric Bautrant a réglé mon problème de vestibulite, consécutive d’un syndrome d’Alcock, d’un coup de scalpel. C’était en 2011, après 10 ans d’errance médicale. Le syndrome d’Alcock est désormais sous contrôle avec des infiltrations d’acide hyaluronique tous les 2/3 ans et de la kiné adaptée. Hélas, j’ai rencontré le dr Bautrant trop tard pour sauver mon mariage : difficile pour le conjoint d’assister impuissant à cette souffrance, sans parler des doutes, de la culpabilité et de la frustration qui s’insinuent dans le couple.

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